LES PORTIQUES À FERMES TREILLIS
<= Notes sur
les pratiques techniques
Définition: systèmes
de barres rectilignes situées dans un même plan et assemblées entre elles selon
des triangles (d’où leur appellation : systèmes triangulés). On peut
considérer que les treillis ont des nœuds fixes. La tendance actuelle est à l’élargissement des mailles et à
l’emploi de sections tubulaires avec assemblages soudés sans goussets.

Elles sont constituées:
- membrure supérieure (arbalétrier)
- membrure inférieure (entrait)
- âme à treillis (étrésillons), constituée d’éléments
verticaux (montants) et obliques (diagonales)

Les fermes treillis sont généralement articulées à leur
appuis car il est délicat de réaliser de bon encastrement avec des treillis
(efforts surabondants dans les membrures). Bien que beaucoup plus performantes que les profils pleins,
elles sont pourtant plus onéreuses du fait d’un temps de main d’œuvre plus
élevé, ce qui ne les rend compétitives que pour:
- les grandes portées
- bâtiments légers standardisés, produits en grande série en
usine (type hangars agricoles avec couverture sèche)
pour le calcul on peut admettre une analogie avec le calcul
des profilés à âmes pleines : les
membrures reprennent principalement les moments fléchissant, les étrésillons
reprennent principalement les efforts tranchants. Pour les longueurs de
flambement il convient de créer des points fixes hors du plan, soit avec des
ciseaux verticaux, soit avec les pannes reliées directement à la poutre au vent
(on admet que dans le plan les nœuds de treillis sont des points fixes).
Conception
des nœuds des systèmes réticulés
- les nœuds des centres de gravité de toutes les barres
doivent se trouver dans un même plan, qui doit être le plan de symétrie par
rapport à tous les plans principaux (sinon moment de flexion et de torsion
parasite) . e.g. utiliser des doubles cornières et non des cornières
simples
- les lignes des centres de gravité des barres doivent
coïncider autant que possible avec le tracé théorique du système réticulé,
celles-ci se rejoignant au point d’épure (P.E.)
pour les cornières, les lignes de trusquinages et d’épures
ne sont pas confondues, d’où deux cas :
- la ligne des centres de gravités des barres coïncide avec le
tracé théorique du système réticulé ; il en résulte un moment
supplémentaire au niveau du boulonnage
- cisaillement supplémentaire des boulons (négligeable)
- moment de flexion dans les cornières, limité au niveau du
boulonnage
- la ligne de trusquinage coïncide avec le tracé théorique du
système réticulé (cas le plus fréquent) : les forces agissant suivant la
ligne des centres de gravité de chaque élément il en résulte un moment parasite
qui se répartit aux barres sur toutes leur longueurs, au prorata de leur
raideur. Le supplément d’effort dans les boulons est négligeable
pour les cornières on a deux cas :
si k-d < 20 LT
confondue avec LE ; il s’agit du cas des cornières jusqu’à 70
si k-d > 20 LT et
LE ne sont pas confondues ; il s’agit du cas des cornières à partir de 80
- le centre de gravité de l’ensemble des cordons de soudure
ou du groupe de boulons qui attachent une barre dans un nœud doit se situer sur
une ligne des centres de gravité de la barre considérée ou à une distance aussi
réduite que possible de celle-ci
- les assemblages des barres doivent être aussi courts que
possibles :
- diminution de l’encombrement et du poids
- on se rapproche de l’hypothèse des nœuds articulés
- dans les assemblages soudés on doit tendre à réaliser la
transmission la plus directe possible des efforts, en évitant si possible les
pièces intermédiaires
- les agglomérations de soudures et les formes d’assemblages
soudés qui peuvent donner lieu à des contraintes résiduelles importantes
(tension tri-axiales) doivent être évitées.
- dans les cornières tendues, attachées par boulonnage sur
les deux ailes on est parfois obligé de positionner les boulons en quinconce
afin d’avoir une section nette supérieure
dans la réalité des efforts secondaires créent des moments
plus ou moins importants dus à:
- une certaine rigidité des nœuds, les articulations n’étant
pas parfaites
- des excentrements au niveau des assemblages (lignes de
trusquinages non parfaitement coplanaires ou non strictement concourantes).

- Déformations d’effort axial des barres de treillis créant
des dénivellations d’appuis pour les membrures qui sont en principe continues
sur plusieurs panneaux de triangulations.
- Déformations imposées au treillis lors du montage pour
compenser des défauts d’assemblages ou de fabrication.
- Présence de charges appliquées entre les nœuds de treillis
(flexion locale directement appliquée sur la barre concernée)
Ces moments secondaires peuvent être
négligés dans certains cas de figure, notamment lorsque:
- Les excentrements sont faibles. C’est en général le cas pour
les cornières (la ligne de trusquinage est différente en effet de la ligne
moyenne, dans ce cas il est préférable de choisir que les lignes moyennes
soient concourantes, cela engendre un moment de flexion dans la barre plus
faible)
- Les éléments présentent un fort élancement (faible rigidité
en flexion), l’hypothèse d’articulation
parfaite est valable. On néglige alors les moments secondaires si le
flambement n’est pas un risque d’instabilité et si

Attention : ceci
n’est valable que pour des charges quasi statiques (bâtiment) ; dans le
cas contraire (effet de fatigue du aux sollicitations répétées), il est
impératif de prendre en compte les moments secondaires et d’évaluer précisément
la différence de contraintes en tenant compte des contraintes secondaires de
flexion.
- Les éléments respectent un élancement maximal pour avoir une
certaine rigidité des barres et pour éviter la possibilité de résonance sous
l’effet du vent. Il est d’usage de ne pas dépasser les limites suivantes :

types d’assemblages: ceux ci
peuvent être:
- Boulonnés par boulons ordinaires, surtout sur chantier.
Commodes à assembler ils autorisent un glissement des assemblages provoquant un
supplément de flèche non négligeable, auquel il faut être vigilant si des
critères particuliers de déformations sont exigés.
- Soudés
- Boulons HR
Dans ces deux derniers cas il n’y a
pas glissement de l’assemblage et la cohérence entre le résultat théorique des
déformations et le comportement réel de la poutre est assurée.
La conception des nœuds et des
assemblages doit être simple et facilement réalisable, car le coût de la main d’œuvre
représente plus de la moitié du coût total d’une poutre treillis. C’est aussi
la raison pour laquelle on cherche à assembler au maximum les fermes treillis
en atelier, sauf en cas de structures importantes à cause des difficultés de
transport (gabarits routiers). On cherche en ce cas à diviser la poutre et
assembler les différentes parties sur site, généralement à l’aide de boulons.
typologie des fermes treillis: il existe
divers sorte de treillis, de forme triangulaire, trapézoïdale ou droite. Les
treillis sont en N, V, K, etc. les différences entre ces fermes portent sur
l’inclinaison relative des membrures ainsi que de la forme de la triangulation.
Types de
fermes
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Fermes américaines
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Fermes anglaises
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Fermes belges : montants perpendiculaires à
l’arbalétrier
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Fermes Polonceau : pour pente et portées importantes,
gain de poids ; les montants sont disposés comme pour les fermes
américaines ou belges.
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Fermes
à la mansarde : conception de vieux bâtiments civils,
très rare dans les constructions industrielles ;
difficultés d’étanchéité au droit des
membrures ; libère beaucoup d’espace dans les combles.
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Fermes en shed : lorsque l’on veut une grande
luminosité sans ensoleillement
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Fermes en parapluie : difficultés de montage
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Eléments constitutifs:
les
fermes treillis sont composées généralement
d’éléments jumelés afin
d’éviter
toute dissymétrie et se prémunir ainsi contre les
sollicitations de flexion
gauche, de torsion et de déversement. Les membrures sont
constitués de doubles
cornières, simples ou renforcées de plats, de double U,
de T ou de profils
creux (ronds ou carrés).

Conception
Démarche générale de conception:
- le type de couverture donne l’écartement entre pannes et la
pente admissible
- entretoiser les cornières par des boulons et des rondelles
tous les 50 rayons de giration en cm, ceci pour éviter le flambement individuel
des cornières.
- ans certains cas les cornières sont en ailes de moulins pour
pouvoir accrocher des contreventements verticaux.
- L’inclinaison favorable des cornières est de 45°
- Limiter la longueur des éléments comprimés ; on
préférera donc les types avec diagonales tendues et montants comprimés.
- Ecartement entre fermes : un petit écartement conduit à
un nombre élevé de fermes (i.e. excès de poids), mais les pannes deviennent
légères. Un grand écartement conduit à une construction optimale des fermes,
mais les pannes deviennent lourdes. pour les toitures légères l’écartement des pannes
varie entre 5 et 6m.
- Lorsque l’utilisation d’un bâtiment impose un très grand
écartement des poteaux, on peut avoir recours à des empannons, supportés par
des poutres longitudinales reportant les charges sur les poteaux.
hypothèses de calcul: on admet
que:
- les barres sont rigides et indéformables (les allongements
ou raccourcissements des barres, en effet, sont faibles; néanmoins leur
cumul exige de vérifier la déformation globale de flèche)
- les nœuds sont considérés comme des articulations parfaites,
sans frottement. Il faut que la rigidité des barres corresponde à cette
hypothèse. Toutefois les calculs ainsi menés placent en fait en sécurité car
conduisant à surestimer les efforts d’au moins 10%.
- Les axes neutres des barres sont supposés concourants aux
nœuds où elles convergent. Le fait de confondre ligne neutre et ligne de
trusquinage entraîne des efforts secondaires dus à l’excentrement
- Le poids propre des barres est négligé par rapport aux
forces extérieures sollicitant la structure
- Les forces extérieures sont supposées être situées dans le
plan de la structure et appliquées aux nœuds, ce qui conduit à n’avoir que des
efforts normaux dans les barres (compression ou traction) ; les efforts
appliquées entre les nœuds engendrent des contraintes de flexion
supplémentaires.
- Les calculs ne sont conduits qu’en élasticité, l’utilisation
des propriétés plastiques de l’acier ne s’appliquant pas aux poutres ajourées
(mais il est certain que sous des charges extrêmes des rotules plastiques
peuvent apparaître dans ce genre de système)
Démarche des calculs:
- déterminer, à partir des actions sollicitant le système
triangulé, les efforts de compression ou de traction dans les barres
- vérifier les barres à la traction, à la compression
(flambement), et au cisaillement (membrures)
- on vérifie enfin la ferme globalement au déversement et aux
déformations ; pour cela on calcule les caractéristiques du profilé plein
équivalent
Prédimensionnement: le choix
d’une hauteur h de ferme dépend de la portée :

Stabilité
des bâtiments treillis
Poteaux
encastrés au pied et libre en tête
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Poteau
articulé au pied et encastré en tête
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Poteau
encastré en pied et en tête
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Tête de poteau articulée: elle est
obtenue par repos direct de la point de la ferme sur la tête du poteau, ou par
une faible retombée latérale ; c’est la faible raideur des barres qui fait
que l’hypothèse d’articulation est valable. Le centrage du point d’épure sur le
nu intérieur du poteau a l’avantage de solliciter les boulons d’attaches au
cisaillement pur, sans grande gêne pour le poteau.
Tête de poteau encastrée: lorsque
l’effort d’encastrement est important, on centre le point d’épure à l’intérieur
du poteau et on prévoit un gousset unique pour l’attache de l’arbalétrier et de
l’entrait:
Nota: Lorsque les fermes sont
encastrées sur les poteaux pour former des portiques de stabilité transversale,
elles subissent des sollicitations complémentaires dues aux actions du vent sur
les long pans du bâtiment.
Important Validité de l’hypothèse articulation: les
facteurs pouvant la mettre hors jeu sont ceux qui créent des moments
secondaires : déformabilité du treillis combinée à la continuité de la
membrure, défauts de convergence aux nœuds des lignes d’épures des barres,
application des charges transversales en dehors des nœuds de triangulations,
etc.
Risques d’instabilités et remèdes: les
efforts de compression peuvent produire un flambement dans le plan de la poutre
ou perpendiculaire au plan de la poutre. Le point délicat est d’évaluer la
longueur de flambement.
L’Eurocode 3 préconise de prendre comme longueur de
flambement la longueur d’épure entre les nœuds de triangulation (5.8.2 1), ce
qui est cohérent avec l’hypothèse de nœuds parfaitement articulés.
Toutefois l’Eurocode 3 autorise une réduction de la longueur
de flambement dans le plan de la poutre pour tenir compte de la rigidité réelle
des liaisons, à conditions que les liaisons par boulons ordinaires soient
attachées par au moins deux boulons, ou bien d’avoir affaire à un assemblage
encore plus rigide (soudage).
Aucune réduction n’est admise pour le flambement des barres
hors du plan du treillis. Dans ce cas la longueur de flambement est prise égale
à la longueur entre appuis latéraux du treillis. En général cette longueur est
quand même diminuée en posant des maintiens hors plan pour les membrures, maintien
bloqués par des éléments de stabilité générale du bâtiment.

En général seule la membrure supérieure est comprimée (cas
des efforts descendants sur ferme treillis où l’entrait est tendu et
l’arbalétrier comprimé). Mais il n’en est pas toujours ainsi, comme quand le
soulèvement du au vent excède les charges descendantes (cas des bâtiments
ouverts). L’entrait peut aussi être comprimé:
- dans les zones d’appui, lorsque les poutres sont continues
d’une travée à l’autre:

- dans les zones d’appui lorsque les fermes sont encastrées
sur les poteaux:

solutions:
- Ciseaux: les ciseaux entre fermes relient
un point de la membrure inférieure à l’aplomb d’une file de pannes, aux deux
nœuds de membrures supérieures des fermes voisines. Une barre sur deux est
active en traction, en fonction du sens de l’instabilité latérale. L’autre
barre se dérobe par flambement élastique.

Pour dimensionner les ciseaux il est d’usage de considérer
que l’entrait à stabiliser exerce un effort horizontal transversal au droit de
l’attache des ciseaux égal à 1/100° de l’effort de compression qu’il subit.
- Au bord du bâtiment sur la ferme de pignon, le bardage crée
un effort transversal sur la ferme de pignon. Dans ce cas, soit la barre
comprimée du ciseaux est dimensionnée en prenant compte le risque de
flambement, soit la barre comprimée reste effectivement inactive, mais on met
en place un buton horizontal reliant les deux membrures inférieures:
-
Bracons : les bracons relient la membrure
inférieure à une section de travée des pannes, elles mêmes fixées directement
au contreventement.

Une barre sur deux est active en traction pour un sens donné
de l’instabilité latérale, l’autre barre se dérobant par instabilité élastique.
On peut ne mettre qu’un seul bracon, mais dans ce cas on doit le dimensionner
en considérant le risque de flambement.
L’inconvénient des bracons est qu’ils sont fixés aux pannes
et donc peuvent subir avec elles des déformations verticales provoquant une
déformation imposé à la ferme, donc son déversement ! les déformations des
pannes doivent donc être très faibles sous chargement vertical descendant. Dans
le cas d’un soulèvement, par contre, les bracons sont actifs car ils sont
sollicités en traction.
Dimensionnement de l’entrait : l’entrait
subit une compression variable entre les points de maintient, car les
dispositifs de maintien latéraux par ciseaux ou bracons sont disposés avec un
espacement correspondant à plusieurs panneaux de triangulations des fermes. La
vérification au flambement hors plan du treillis se fait alors:
-
Pour l’effort maximum de compression
- Pour une longueur de flambement fictive égale à :

Avec:

si l’effort normal est un effort de traction on prendra
alors comme valeur la valeur négative de traction mais en limitant sa valeur
absolue à 20% de la compression maximale. On plafonne ainsi la réduction à 30%
sur la longueur de flambement fictive.