L'HOMME ET L'OUTIL

L'homme doit à ses mains une bonne partie de son intelligence - Jean Piaget

L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant - Blaise Pascal

<= Notes sur les pratiques techniques


Depuis ses formes les plus humbles jusqu'aux plus complexes la vie est activité, triomphant de la matière en mettant en œuvre des mécanismes exactement appropriés à leurs fins. Qu'il y ait ou non finalité du monde vivant, on ne peut qu'admirer cette apparente ingéniosité constructrice.

Il y a homme lorsqu'il y a outil, et les préhistoriens ont parlé à juste titre d'homo faber. Les animaux, par leur instinct, mettent bien en œuvre des techniques, en opérant une transformation opportune des choses extérieures, pouvant même parfois utiliser des outils pour une action immédiate. Mais alors que les différentes espèces vivantes habitent des niches écologiques précises, l'homme, par sa faculté d'adaptation, envahit tout les milieux. Ce qui distingue finalement en premier lieu l'homme de l'animal c'est la permanence de l'outil. En second lieu l'outil, sa réplication, suppose la pensée réfléchie, la possibilité d'avoir en tête l'image, l'idée de l'outil et de son mode d'obtention. 

Il y a trés longtemps dans le processus d'hominisation la station debout occasionnelle, puis la marche bipéde permanente, a libéré la main de sa fonction locomotrice et en a fait le premier outil. Le cerveau humain s'est sans doute développé en interaction avec la main, le cerveau concevant et la main créant des outils de pierre, bois, os, cuir. Physiquement la machoire, les dents, les mains n'ont plus besoins d'être aussi puissantes. Durant le même temps, le cerveau grossit, en particulier les lobes frontaux, sièges de la conscience. Transformations psychiques et physiques vont de pair. Le cerveau humain est devenu plastique: le bébé humain n'a que trés peu d'instincts, mais il a la faculté d'apprendre. 

Le langage articulé a été l'autre grand acquis de l'humanité, vecteur de l'abstraction et de la pensée consciente, permettant la transmission de la culture dans les société humaines, et ainsi d'échapper aux comportement stéréotypées des animaux, à un certain déterminisme génique. La culture est la condition nécessaire de la technique, car celle-ci suppose la transmission d'un savoir et une pensée réfléchie, et il est évident qu'aucune invention n'a pu aboutir, se répandre, ailleurs que dans un milieu social prête à la recevoir. 

On doit ainsi prendre ce terme de technique au sens large. Le langage, l'enseignement, le droit, sont des techniques tout à fait essentielles. Il reste que les premières traces d'humanité certaines sont ces outils de pierre conservés pendant des millions d'années dans les strates successives et mis au jour les deux siècles passés. 
L'Âge de la pierre: L'outil le plus simple est obtenu à partir d'un galet de pierre percuté par un autre caillou. L'éclat avec son tranchant constitue l'outil primitif. Vient ensuite le galet aménagé, c'est ce qui reste lorsqu'on a enlevé un ou plusieurs éclats d'un rognon de pierre. Ces premiers outils ont servi durant des milliers de siècles avant d'être perfectionnés.

Durant tout l'âge de la pierre, l'outillage se diversifie et s'enrichit, tant sur les formes des outils que sur les techniques de réalisation. Un premier progrés a été les outils à double tranchants (bifaces). Les hommes de la préhistoires s'aperçurent par la suite qu'en frappant de biais on obtenait des éclats plus long, plus fins. Cela demanda sans doute beaucoup de tatonnements et de réflexions, car le point d'impact et la force du bras doivent être ajustés suivant qu'on veut obtenir une hache ou un racloir. Les éclats eux mêmes seront plus tard retouchés, repris, pour devenir des outils différents, couteaux, grattoirs, hameçons, flèches...

Ces progrés furent trés lents et s'étendirent sur des centaines de milliers d'années, et sur différentes espéces d'humanités (en partant d'homo abilis, il y a deux millions d'années, premier hominidé dont on ne doute pas de l'humanité). 

Racloir, pointes et biface:

On doit noter que si les outils de pierres sont ceux qui sont parvenus jusqu'à nous, ce n'étaient sans doute pas les plus importants pour l'homme de la préhistoire qui a sans doute plus utilisé l'os, le bois, le cuir, matériaux dont la conservation n'a pu se faire que dans de trés rare cas. 

Chopper: simple galet aménagé, il s'agit d'un des tout premiers outils de l'humanité, obtenu par un choc perpendiculaire à la pierre
Etapes de fabrication d'un chopper:


Biface: outil façonné dans sa totalité par un travail d'éclatement beaucoup plus fin, nécessitant notamment des coups obliques sur le galet. Il permet d'avoir un tranchant rectiligne.
Étapes de fabrication d'un biface:

Pointe Moustèrienne
Lissoires en os
Hache néolithique (reconstitution)
Herminette néolithique (reconstitution)
Rabot néolithique (reconstitution)

Le feu: Autre grand acquis technique, la maitrise du feu. Source de lumière et de chaleur, il ouvre la voie aux autres progrés (cuisson des aliments, poterie, métallurgie). Les premiers foyers retrouvés datent de 500000 ans, et sont typique d'une occupation anthropique. Sans doute dabord expériment par le phénomène naturel de la foudre, il fut ensuite produit par frottement de bois de dureté différentes, par sciage, forage manuel ou par archet. On pouvait aussi le produire par percussion d'une lame de silex sur de la pyrite.


La poterie: il s'agit de l'ensemble des objets façonnée en argile, puis durcis au feu (ci. 500 à 700°C). La première utilisation de l'argile a été la réalisation de briques crues (sumer) pour la construction. Les premières traces de poteries utilitaires datent de 10000 ans. 

Permise par la domestication du feu, cette technique est typique des populations sédentaires. Les poteries sont en effets fragiles, mais permettent de constituer des stocks. 


Âge du cuivre: les premiers métaux à être utilisés, il y a quelques 10000 ans, sont ceux qu'on trouve à l'état natif, le cuivre et l'or. Il semble que leur première utilisation ait été l'ornement, car la malléabilité de ces métaux ne se prête pas à la fabrication d'outils et d'armes. Un jour l'homme apprit qu'en chauffant certaines pierres (malachite verte, azurite bleue, etc.) de façon suffisamment forte (ci. 800°C), à l'aide de fours dotés de soufflets de cuir et de céramiques, du cuivre s'écoulait. La première métallurgie était née. Les premiers fours datent de 6000 ans.


Âge du bronze: Lorsqu'on sut mélanger le cuivre et l'étain, il y a à peu prés 5000 ans, on obtint du bronze. Les premiers minerais contenaient sans doute les deux métaux, puis on rechercha les minerais de l'un et de l'autre séparément. Par rapport au cuivre le bronze est plus dur, plus résistant, et se moule trés facilement, permettant d'en faire des outils.

Haches en bronze:

Bijoux en bronze:


Âge du Fer: Entre le VI° et le III° millénaire av. J.C. on voit apparaître, d'Egypte en Mésopotamie et à l'Indus, des objets en fer.Découverte majeure, le fer a l'avantage d'être moins lourd que le bronze, se prêtant mieux à la fabrication d'outils agricoles, et d'avoir des gisement trés nombreux, diminuant les coûts de revient.